• Compétition Internationale

Se escuchan aullidos

Cinéaste à la filmographie célébrée (Hasta el sol tiene manchas, FID 2012, Cómprame un revólver, Quinzaine des réalisateurs 2018), Julio Hernández Cordón n’a rien perdu de son esprit de subversion et d’expérimentation. Faire du cinéma une pure puissance de jeu et de joie, employer ce jeu joyeux à l’exploration d’un territoire et au voyage dans le temps : tel est le réjouissant programme de Se escuchan aullidos. Le territoire de jeu est Texcoco, la ville mexicaine où le cinéaste a grandi. Le temps, c’est celui qui à la fois sépare et rapproche son enfance de celle de sa fille, Fabiana. La règle du jeu : inviter Fabi à arpenter le terrain de jeu du jeune Julio, suivre les trajets de l’adolescente d’aujourd’hui comme le tracé d’un double portrait : le sien, et celui de son père enfant. Masqué comme un voleur ou un super-héros, Julio se faufile dans le cadre pour chuchoter à l’oreille de sa fille, lui souffler les anecdotes de son enfance : creuser un tunnel pour s’enfuir de l’école, escalader les clôtures les plus acérées, se baigner dans le réservoir d’eau du quartier… Fabi répète à voix haute, amusée d’en apprendre de si belles sur son garnement de père. « Mon papa voulait être un voleur ou un espion. Moi je ne sais pas, je veux être moi-même », dit-elle. Elle l’est, à chaque instant, en jouant à rejouer et redire l’enfance de son père. Être soi-même en jouant (avec) les autres, se raconter en racontant l’autre : on entend des hurlements, c’est le spectateur qui hurle de plaisir. Double portrait, double traité : de désobéissance enfantine et de désinvolture artistique. Le cinéma que bricole Hernández Cordón avec sa fille et quelques amis est le plus libre et sauvage que l’on puisse rêver. C’est aussi le plus précis et rigoureux, en ce que chaque plan canalise et intensifie l’énergie de l’improvisation par un génie instinctif du cadre, de la composition entre figures et fonds, corps et lieux. Prodige de cinéma qui, tout en creusant par l’image un passage souterrain entre deux enfances, emploie cette double enfance à réenchanter le territoire exploré, à le sauver, le temps d’un film, du désastre écologique et d’une urbanisation désertique car sans mémoire. (C.N.)
Julio Hernández Cordón

  • Compétition Internationale
10:0023 juillet 2020Théâtre du Gymnase
10:3025 juillet 2020Variétés 2
19:0026 juillet 2020Variétés 3

Fiche technique

Mexique / 2020 / Couleur / HD, Dolby Digital, HD, Stereo / 70’

Version originale : espagnol.
Sous-titres : anglais.
Scénario : Julio Hernández Cordón.
Image : Jaiziel Hernández.
Montage : Rodrigo Ríos.
Musique : Alberto Torres.
Son : Mauricio López.
Avec : Fabiana Hernández Guinea, Francisco Barreiro, Julio Hernández Cordón, Graciela González, Alejandra Estrada.
Production : Un Beso (Daniela Leyva Becerra Acosta & Andrea Toca), Francisco Barreiro, Julio Hernández Cordón.
Distribution : There’s no one.

 

ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR