Dans son premier long-métrage, Suwa suit un jeune couple. Kei, acteur fauché, vit aux crochets de Yu, vendeuse dans une boutique de mode. Dans leur minuscule appartement vont s’enchevêtrer jusqu’à l’explosion le monde du dehors (l’économie, le travail, la reconnaissance), et celui de leur histoire d’amour. Ce qui deviendra la signature de Suwa, sa voix discrète et si singulière, est là, ample et violent : description scrupuleuse d’un déchirement dont les motifs sont laissés à l’interprétation, alternance de temps documentaires (les amants répondent par exemple tour à tour à un interviewer invisible) et de drame, échappée finale coupant aux conventions usuelles, etc. C’est le Japon de ces années tout entier qui se dessine ici, au travers de ces destinées cruelles.
Jean-Pierre Rehm