Emmitouflées dans de splendides pèlerines d’allure médiévale, deux jeunes femmes cheminent. Parties en pèlerinage pour une destination fort humble, elles parcourent de petites routes de campagne, et devisent à l’écoute l’une de l’autre. La première, Mili Pecherer, la réalisatrice, porte sur son dos un fardeau aussi grotesque qu’énigmatique : un énorme baluchon en forme d’hémorroïde. La seconde, quand à elle, porte un enfant à naître. On l’aura compris, voici réunis et le sérieux et le cocasse pour cette pérégrination
sur les contreforts des Pyrénées, ouverte sous les auspices d’un chant moyenâgeux aux tonalités carnavalesques et irrévérencieuses. Ce voyage sera dans la tradition picaresque l’occasion de rencontres : avec tel agriculteur père de famille qui les accueille, avec tel inventeur d’une machine à retrouver les chats égarés. Sans oublier un âne, compagnon de route d’un moment
de cette équipée fantasque. S’esquisse ainsi un film comme moyen de conjuration des angoisses existentielles, genre connu, ici subverti par l’esprit de candeur et la distance burlesque adoptés. Une quête librement inspirée de « Ce que nous apprennent les lys des champs et les oiseaux du ciel » de Kierkegaard, qui s’écarte des chemins tracés comme l’annonçait discrètement le plan d’ouverture. Pèlerinage paradoxal – Lourdes n’est pas loin mais malicieusement éludée – : revenir à soi par le chemin ainsi dessiné et non par une révélation, comme le pointe l’entrevue finale en rien conclusive, aussi saugrenue que programmatique. (N.F.)
Mili Pecherer