Les trois cinéastes Ferri, Menegazzi, Pernisa rendent visite à Franco Piavoli dans son jardin pour qu’il leur raconte, à l’âge de 90 ans, son prochain projet : dans le récit qui surgit, Piavoli, réalisateur iconique du cinéma indépendant italien, nous prend par la main et nous emmène découvrir son Paradis Terrestre. Piavoli devient Adam, il marche avec Ève vers un sommet d’où contempler et connaître l’infini, mais c’est dans les détours du chemin, dans les pauses, que le paradis leur est révélé : le plaisir des sens, un état de grâce à deux. Ce voyage imaginaire est aussi biographique, le rêve profondément enraciné dans la dimension matérielle et quotidienne ; invitation à la plénitude de la présence, à l’intensité de l’expérience et de la relation au monde.
Par son monologue, qui s’adresse à sa compagne Silvia, Franco Piavoli emmène les cinéastes et les spectateurs dans un état proche de l’hypnose. Tandis que sa fabulation nous fait redécouvrir l’enchantement du monde, les temps se mêlent : le paradis est en même temps le souvenir du passé, le présent immédiat de la sensation et une tension vers l’imagination, vers la découverte.
Le dispositif contraignant proposé par les cinéastes, deux bobines de pellicule Super 8 l’une après l’autre, amplifie cet état de rêverie : quand les images devient noire, c’est la voix de Piavoli qui emporte au plus profond de l’intimité. Fugacement, nous avons l’intuition qu’une vie entière nous est dévoilée.
Margot Mecca