Pouvez-vous nous parler des circonstances qui ont donné naissance à votre film, à la fois pour vous et pour les deux amis que vous filmez ?
Il y a sept ans, alors que je séjournais dans une auberge à Moscou, j’ai commencé à rêver de la Normandie, inspiré par le poème de Boris Ryji, La mer : « Il voulait voir la mer où toute souffrance prend fin… ».
Après avoir quitté la Russie et passé deux mois à Istanbul, nous sommes arrivés à Paris le 20 mai 2022. Après deux mois, je me suis trouvé isolé, perdu. Pour me sentir mieux en France, pour lutter, je ressentais le besoin impérieux de voir enfin la Normandie, de faire un geste qui pourrait me libérer, faire un nouveau pas, éclairer de nouveaux horizons dans ma propre vie. En plus, j’avais prévu d’y retrouver mon ami Anton et sa compagne Katia.
À cette époque, Katia rendait visite à sa mère en Suisse, qu’elle avait elle-même emmenée de Kharkiv en voiture quelques mois plus tôt. Anton, qui venait de perdre une jambe à cause de sa maladie, est venu pour voir les cathédrales gothiques et me rencontrer en Normandie. C’était son premier voyage après son opération. Je suis arrivé à Caen le 31 août, rejoint par ma femme, Natacha Goncharova, le lendemain. Deborah Lennie nous avait prêté sa maison à Caen, où nous avons enfin pu bien dormir. Bien que notre avenir restât incertain et que nous n’ayons pas encore de logement stable à Paris, ce voyage et ce tournage nous insufflaient déjà un semblant d’espoir.
Le 3 septembre, nous avons rencontré Anton et Katia, venus en voiture depuis la Suisse. Le lendemain, nous avons exploré la côte normande, visitant Le Havre, Étretat et Dieppe, où nous avons tourné la majeure partie du film. Après notre retour à Caen, Anton et Katia sont repartis en Russie, tandis que nous sommes retournés à Paris où nous sommes toujours.
Ces deux amis n’apparaissent qu’au tiers du film. Pourquoi avoir choisi une introduction sans ces personnages ?
C’était une question d’intuition, d’aspiration à découvrir quelque chose que je ne connaissais pas encore. Dans ce film, on peut voir un exemple de ce que je pourrais nommer « cinéma d’impression » : un cinéma où nous recevons des impressions pures d’un moment précis, où les participants deviennent le sujet principal de leur propre vie, rendue visible et réfléchie à travers une optique précise. Le film sert de motif, d’espace tiers, d’autre dimension qui ne se réduit ni à un documentaire ni à une fiction, mais qui manifeste une présence. Je ne savais pas jusqu’au dernier moment si Anton et Katia seraient dans le film, ni comment cela se produirait, et je ne leur avais donné ni mots ni directions.
Une figure que vous utilisez souvent est le fondu, de telle sorte que nous ne sommes parfois pas sûrs si un nuage est venu cacher le soleil ou si le plan s’est simplement terminé. Pourquoi ce procédé de montage ?
Pour obtenir un rythme, une harmonie.
Vous n’utilisez aucune musique, et avez fait le choix de rendre les voix de vos personnages audibles mais à peine, souvent concurrencées par le bruit de l’océan. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre travail sur le son, lors du tournage et du mixage ?
Pour le son, j’ai utilisé un enregistreur capable de capturer toute la sphère sonore, afin d’obtenir une immersion profonde et réelle. Tout est simple : il s’agit de transporter l’espace de tournage dans la salle de cinéma de manière propre et intacte. La conception du son visait également à exprimer la présence et à montrer comment les êtres humains font partie intégrante du paysage naturel, sonore et visuel, où tout est égal. Lors du mixage, nous avons conservé tout le montage sonore que j’avais déjà réalisé, en ouvrant encore plus le son pour obtenir une présence accrue et une harmonie musicale de l’œuvre dans toute sa pureté.
Pouvez-vous nous parler des circonstances qui ont donné naissance à votre film, à la fois pour vous et pour les deux amis que vous filmez ?
Il y a sept ans, alors que je séjournais dans une auberge à Moscou, j’ai commencé à rêver de la Normandie, inspiré par le poème de Boris Ryji, La mer : « Il voulait voir la mer où toute souffrance prend fin… ».
Après avoir quitté la Russie et passé deux mois à Istanbul, nous sommes arrivés à Paris le 20 mai 2022. Après deux mois, je me suis trouvé isolé, perdu. Pour me sentir mieux en France, pour lutter, je ressentais le besoin impérieux de voir enfin la Normandie, de faire un geste qui pourrait me libérer, faire un nouveau pas, éclairer de nouveaux horizons dans ma propre vie. En plus, j’avais prévu d’y retrouver mon ami Anton et sa compagne Katia.
À cette époque, Katia rendait visite à sa mère en Suisse, qu’elle avait elle-même emmenée de Kharkiv en voiture quelques mois plus tôt. Anton, qui venait de perdre une jambe à cause de sa maladie, est venu pour voir les cathédrales gothiques et me rencontrer en Normandie. C’était son premier voyage après son opération. Je suis arrivé à Caen le 31 août, rejoint par ma femme, Natacha Goncharova, le lendemain. Deborah Lennie nous avait prêté sa maison à Caen, où nous avons enfin pu bien dormir. Bien que notre avenir restât incertain et que nous n’ayons pas encore de logement stable à Paris, ce voyage et ce tournage nous insufflaient déjà un semblant d’espoir.
Le 3 septembre, nous avons rencontré Anton et Katia, venus en voiture depuis la Suisse. Le lendemain, nous avons exploré la côte normande, visitant Le Havre, Étretat et Dieppe, où nous avons tourné la majeure partie du film. Après notre retour à Caen, Anton et Katia sont repartis en Russie, tandis que nous sommes retournés à Paris où nous sommes toujours.
Ces deux amis n’apparaissent qu’au tiers du film. Pourquoi avoir choisi une introduction sans ces personnages ?
C’était une question d’intuition, d’aspiration à découvrir quelque chose que je ne connaissais pas encore. Dans ce film, on peut voir un exemple de ce que je pourrais nommer « cinéma d’impression » : un cinéma où nous recevons des impressions pures d’un moment précis, où les participants deviennent le sujet principal de leur propre vie, rendue visible et réfléchie à travers une optique précise. Le film sert de motif, d’espace tiers, d’autre dimension qui ne se réduit ni à un documentaire ni à une fiction, mais qui manifeste une présence. Je ne savais pas jusqu’au dernier moment si Anton et Katia seraient dans le film, ni comment cela se produirait, et je ne leur avais donné ni mots ni directions.
Une figure que vous utilisez souvent est le fondu, de telle sorte que nous ne sommes parfois pas sûrs si un nuage est venu cacher le soleil ou si le plan s’est simplement terminé. Pourquoi ce procédé de montage ?
Pour obtenir un rythme, une harmonie.
Vous n’utilisez aucune musique, et avez fait le choix de rendre les voix de vos personnages audibles mais à peine, souvent concurrencées par le bruit de l’océan. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre travail sur le son, lors du tournage et du mixage ?
Pour le son, j’ai utilisé un enregistreur capable de capturer toute la sphère sonore, afin d’obtenir une immersion profonde et réelle. Tout est simple : il s’agit de transporter l’espace de tournage dans la salle de cinéma de manière propre et intacte. La conception du son visait également à exprimer la présence et à montrer comment les êtres humains font partie intégrante du paysage naturel, sonore et visuel, où tout est égal. Lors du mixage, nous avons conservé tout le montage sonore que j’avais déjà réalisé, en ouvrant encore plus le son pour obtenir une présence accrue et une harmonie musicale de l’œuvre dans toute sa pureté.