Les « rencontres » proposées ici ne font pas se croiser mécaniquement des fragments d’espace ou de biographies, mais aussi, et surtout, d’amples morceaux de durées. Là même réside l’ambition du film, tabler sur la permanence de la beauté, et sur sa capacité à engendrer du temps. Qui sont ces producteurs de durée ? Des poètes populaires de l’Alentejo, quelques films des réalisateurs portugais Antonio Reis et Paulo Rocha. Des poèmes vont à la rencontre des paysages, des paysages filmés sont peuplés de paysans figurants et acteurs, des chants traditionnels transitent du Portugal en Corse pour s’entremêler aujourd’hui. Il ne s’agit pas de ressasser la mémoire d’une culture en voie d’extinction, et d’établir son triste bilan, mais de laisser le passage aux forces vives qui font fi des partages entre ici et là-bas, entre hier et demain. Fait de découvertes autant que retrouvailles, le film de Pierre-Marie Goulet célèbre les puissances de l’art populaire lorsqu’est reconnue à celui-ci la vigueur de sa science.
Jean-Pierre Rehm