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STUDY THE STARS TONIGHT

TUTKITTAVA TÄHTIÄ TÄNÄ ILTANA

Vieno Järventausta,

Lauri Julkunen,

Ida Vesterinen

Une découverte fortuite au fond d’une remise : le cartable d’un enfant mort à la fin des années 1940. L’excavation de son contenu se fait enquête personnelle, historique : que nous disent des objets banals d’une vie d’enfant en milieu de siècle ? Que nous dit notre propre fascination pour ces objets? Les cinéastes filment le travail de déballage : leurs mains viennent en gros plan positionner les objets sur la table, déplier les papiers, tourner les pages. Les hypothèses erronées sont évoquées comme pistes plausibles pour être écartées plus tard. En creux se dessine la trace que laisse une époque sur une vie, et le travail de mise en lumière de ces traces qu’est le métier d’historien.

Nathan Letoré

Vous expliquez que le point de départ du film est la découverte du cartable d’un jeune garçon. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette découverte, et sur le processus qui vous a conduits à en faire le sujet de votre film ?

Nous nous connaissons depuis longtemps. Lauri a trouvé ce sac dans l’abri de jardin de sa grand-mère il y a une dizaine d’années. Le sac et son propriétaire font partie de l’histoire familiale de Lauri, et constituent également un objet d’étude intéressant pour ses recherches en tant qu’historien. Cette dynamique nous a toujours intrigué·es. Les travaux de recherche et l’enseignement d’Ida tournent autour de la question des connaissances historiques, et comment celles-ci sont forgées et créées. Cette question a été le moteur du film, ainsi qu’un de ses thèmes sous-jacents. 

L’événement catalyseur est survenu un soir de 2018, alors que nous discutions tous les trois au sujet du sac et des objets qu’il contenait. Nous étions tous·tes intéressé·es par le fait que, dans le domaine de l’Histoire, les choses qui font l’objet de recherches et le monde matériel en général sont subordonnées au langage : c’est-à-dire que les objets et la matière sont en quelque sorte retranscrits sous forme de langage, les significations et le savoir qu’ils véhiculent sont perdus ou dilués à mesure qu’ils deviennent des réifications du monde social et matériel qui nous entoure.

Dans le film, on vous voit tous les trois discuter, parfois autour d’une table, parfois via internet, et évoquer des hypothèses sur vos découvertes. Comment avez-vous travaillé ensemble, et pourquoi avez-vous choisi de filmer ces interactions ?

Puisque le sujet principal du film est la recherche historique en tant que telle, nous nous sommes senti·es dans l’obligation de rendre le processus de réalisation du film transparent aux yeux des spectateur·ices, le film est réflectif à tous les niveaux. Tous les trois, nous avons approché le film selon des perspectives légèrement différentes : Vieno en tant que réalisateur, et Lauri et Ida en tant qu’historien·nes. Dès le départ, Vieno souhaitait que Lauri et Ida soient impliqué·es dans presque tous les aspects de la réalisation. Nous avons commencé par travailler sur le découpage du film et la chronologie, puis Vieno a ébauché différents montages potentiels, avec une voix off provisoire, etc., pour que nous puissions voir comment différentes idées fonctionnaient. Nous avons fait en sorte que la prise de décision soit toujours collégiale, et durant les étapes ultérieures de la production, cela s’est vraiment concrétisé : les inévitables désaccords se sont résolus et au final, le film est un exemple de collaboration fertile et révélatrice entre l’art et la recherche.

Vous choisissez aussi d’inclure des hypothèses erronées, pour mieux les corriger ensuite. Pourquoi cette décision ?

C’était un choix délibéré, une sorte de dispositif narratif que nous avons établi très tôt. L’idée, c’est que les historien·nes font nécessairement des suppositions qui se révèlent fausses, même si sur le moment, bien sûr, iels ignorent qu’iels se trompent. Nous voulions montrer ce moment aux spectateur·ices, ainsi que l’instant où l’erreur est révélée. Ce type de procédé est envisageable dans un film, car la forme y est chronologique, mais ce n’est pas le cas dans les publications universitaires.

On apprend dans le générique de fin que vous avez interrogé des membres de la famille du garçon, notamment sa sœur. Pourquoi avez-vous choisi de ne pas inclure ces entretiens dans le film ?

Nous voulions que le film se concentre sur les objets et l’interprétation que nous en tirons. Certes, nous souhaitions que le processus d’interprétation apparaisse explicitement, mais nous ne voulions pas réaliser une version filmée d’un rapport de recherche. Nous ne montrons pas les entretiens, mais nous ne montrons pas non plus, par exemple, les articles ou les théories de référence que nous utilisons comme cadre de notre discussion sur le cartable. Il fallait que les objets aient assez d’espace pour interagir avec le·a spectateur·ice, pour lui permettre de se faire sa propre interprétation. Tout comme nous souhaitions que le processus d’interprétation apparaisse de façon explicite, nous voulions aussi souligner le fait que ce qui est montré est spécifiquement notre interprétation ; ajouter d’autres voix au film risquait de brouiller ce message. De plus, les entretiens étaient assez informels, et la sœur du garçon (la grand-mère de Lauri) préférait, tout comme nous, qu’ils servent seulement de documentation, sans apparaître dans le film.

Entretien réalisé par Nathan Letoré

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Fiche technique

Finlande / 2023 / 58’

Production : Vieno Järventausta (Vieno Järventausta)