Extérieur nuit — quelque part en Israël : « Rami, vous cherchez Rami ? Rami n’existe pas » déclare un homme en arabe. On lui rétorque : « Mais imagine qu’il existe. Qui est-il ? » Voilà le projet donné : moins chercher un personnage vrai que passer par le détour de l’invention. Mais de quoi ? Avec un Rami absent comme point de mire en Israël, une autre scène se met en place, à Paris, devant la table de montage de ces images-là justement. Un personnage surgit, l’« Interprète », magistral Laurent Poitrenaux, venu réfléchir et commenter le film, reléguant à l’arrière-plan Judith Abensour et Thomas Bauer, les véritables signataires de ces rushs réalisées à l’occasion d’un échange qui s’avérera problématique, voire infrucueux, entre étudiants français et israéliens. Mise en abîme donc du documentaire à l’intérieur des coulisses de la fiction. Et de glissements d’un espace à l’autre, de la Cisjordanie à Paris, de la salle de montage à un espace scénique affiché, d’une langue à l’autre (hébreu, anglais, arabe, italien), des images vers leur questionnement, les réfractions se multiplient. « La politique, on ne sait parler que de cela », avait lancé un étudiant israëlien. De fait, il s’agit moins de faire un film sur la politique en Israël que d’interroger la possibilité de transmettre, et de transformer un échec en lambeaux d’opéra. Judith ABENSOUR
Nicolas Féodoroff