Le 27 février 2010, les côtes du Chili, au centre du pays, sont secouées par un puissant séisme, tuant plus de cinq cents personnes et endommageant environ 500 000 bâtiments. Le temps paroxystique du choc passé, José Luis Torres Leiva part filmer trois semaines plus tard les zones touchées.
Nous voilà à le suivre dans un univers dévasté, chaos de gravas, de planches déchiquetées, de bâtiments éventrés. Le paysage, telle cette route mollement effondrée à moitié, raconte partout qu’il est devenu étranger, inhabitable : il n’y a, là, plus de pays. Et pourtant, jamais le film ne cède à l’horreur et à sa grandiloquence inutile, jamais il n’entretient de fascination apocalyptique. On ne sera pas étonné, connaissant ses précédents films (FID 2006 et 2008). C’est autre chose que José Luis Torres Leiva essaie de saisir. Ou de donner. Une douceur d’abord, qui passe aussi bien dans des plans de visage que dans ceux qui enregistrent au loin le triste ballet de pelleteuses.
Car une part du drame, c’est qu’après le séisme, il faut casser encore, poursuivre la tâche laissée inachevée du cataclysme. Mais si cette destruction d’après la destruction est douloureuse, elle est aussi le début d’un lent travail de deuil. C’est dans ce mouvement paradoxal que prennent place ces images : non pas en observatrices, mais plutôt comme un cortège de pleureuses silencieuses.
Nicolas Féodoroff & Jean-Pierre Rehm