Au départ, publié en 2005, le livre éponyme d’Aïcha Liviana Messina. Au Chili, cette dame enseigne la philosophie à l’université ; à Paris, elle se dénude pour les artistes étudiants des Beaux Arts. Jolie bascule. Qui permet d’enrouler une réflexion où l’esthétique se fond dans un genre plus très sérieusement (on peut le dire ?) pratiqué : l’autobiographie philosophique. Au programme, des questions connues : qu’est-ce qu’un corps ? Une identité ? Sa représentation ? D’autres, moins connues, exemple : et la nudité, y songez-vous (sérieusement, s’entend) ?
De ce programme écrit, scolaire pour de faux, Sara Pozzoli, réalisatrice italienne, se saisit, pour le transférer, avec ses pointes d’interrogation, ses déplacements, au cinéma. Résultat ? Une belle invention où se mélangent images fixes du quotidien (Aïcha à la ville) avec les plans fixes d’un corps fixe soumis aux regards des dessinateurs, des sculpteurs, en bref du déport de la reprise (Aïcha modèle).
Fait d’allers-retours brillants, le film suggère ceci : un corps, ça pense, nu ou recouvert. Et sa pensée, c’est sa forme, sa visibilité, nu ou recouvert. Non seulement, le film le suggère, mais il le dit, s’y aventure, le guette, et c’est pourquoi un autre corps se risque ici pour l’exposer. Quel autre? Une voix, off, invisible donc, qui accompagne, dévêt tout de suite ou rhabille lentement ce que l’on cherche à voir, et qu’on a pourtant sous les yeux. Circulez, circulez, nous dit cette voix pudique, tout reste à voir, tout reste à dire.
Nicolas Féodoroff & Jean-Pierre Rehm