Azinhaga dos Besouros est un quartier de la banlieue de Lisbonne. Ses habitants assistent à sa destruction méthodique, une autoroute doit y être bientôt construite. Eux sont privés du recours au relogement. C’est à cette débâcle irrémédiable que nous sommes conviés d’assister. Entendues en off, comme la voix sans corps du pouvoir, les missives officielles signifient de leur terrible prose constative les expulsions, déclinent les refus d’autorisation de relogement. Et la violence tient autant à cette rhétorique glacée qu’à son inlassable répétition, aussi efficace dans la désolation que les attaques des bulldozers contre les murs des bâtisses. À l’image, les maisons en sursis, puis détruites. Leurs habitants qui se rebellent avec le bel humour de la dernière santé. À l’attention scrupuleuse portée à l’humanité des détails, Nathalie Mansoux ajoute dans ce premier long-métrage une grande rigueur formelle. Convaincue sans doute, comme Pedro Costa, qu’à l’informe et l’injuste il faut résister par le rappel de la plus grande tenue, elle propose ici moins un rapport qu’un hymne calme à la détresse.
Jean-Pierre Rehm