Au départ, le texte éponyme de Georges Perec qui en quelques séquences, nous livre une description précise, méticuleuse de la place Saint-Sulpice à Paris, ramassée sur trois jours d’octobre 1974. Question, aussi simple que délicate, avec ses chausse-trapes : que peut-il se passer entre ce texte et le cinéma ? A l’écriture scrutatrice, porteuse d’une myriade de narrations possibles, s’attachant aux détails, Riff répond par une captation documentaire, à la banalité affichée, d’où n’émerge aucun événement saillant. Jouant des rencontres (attendues) et des écarts (inévitables, et non moins attendus), Jean-Christian Riff prend le parti de travailler l’intervale qui sépare texte et images, de la coalescence à la disjonction, orchestrant ce décollement. Intervale des modes de représentation auquel s’ajoute le passage du temps, plus de trente ans séparant ces deux projets. Film sous contraintes donc, dont celle du temps de lecture, à l’image de celles que s’assignait Perec. Mais aussi reprise à la puissance deux de l’enjeu du texte, dans une double tentative, celle de la transposition cinématographique et celle de l’épuisement du lieu, avec les mots et par l’image. Comment un texte, ce texte précisément, nourrit l’image, qui, par retour, dans un va-et-viens incessant et paradoxal, nourrit ce texte.
Nicolas Féodoroff