Après Story (FID 2003), portrait splendide et halluciné du cosmonautepoète américain Story Musgrave, Dana Ranga ajoute un autre volet à sa propre conquête spatiale. C’est au tour d’un Russe, cette fois, de confier à la caméra les secrets de l’aventure extraterrestre. La nationalité n’y change rien cependant, la simplicité du dispositif du film précédent est maintenue. Le camarade Poliakov, assis ou debout, toujours immobile, est retenu dans un espace restreint. Guère plus grand, c’est l’idée, que celui des cabines à bord desquelles il a tourné autour de la planète. Et donc, le verbe laissé lui en liberté, Poliakov nous raconte : les entraînements avant le départ, l’attente douloureuse avant de savoir si l’on est élu pour le long voyage, son rôle de médecin cardiologue dans l’équipe, et, enfin les expériences, les sensations, les croyances, de cette petite communauté en plein ciel. Unique licence à cette austère mise à la question, son épouse apparaît quelquefois à ses côtés, comme le rappel d’une attache que ces lents mois passés dans cette prison céleste n’ont pas entamé. Comme le rappel aussi, incarné en un corps de femme, de feue cette Union Soviétique pour laquelle la nuit de l’espace était alors surtout l’enjeu d’un conflit d’idéaux
Jean-Pierre Rehm