• Albert Serra en libertés

SINGULARITY

Albert Serra

Où l’on se retrouve en Irlande – une Irlande qui parle catalan avec l’accent de Fassbinder – des années 30 à aujourd’hui, à suivre dans plusieurs directions parallèles un feuilleton tentaculaire sur deux mines d’or concurrentes, l’exploitation des artistes par le Capital, et l’ouverture concomitante d’un bordel où les femmes n’aimaient pas les hommes. Parce qu’il ne fait rien comme tout le monde, le film le plus narratif et dialogué d’Albert Serra n’est pas fait au départ pour le cinéma : produit pour la Biennale d’art contemporain de Venise, il était montré sous la forme d’une installation, projetant ses chapitres en simultané sur plusieurs écrans. Singularity aurait pu s’appeler « Velvet Goldmine », tant il chante la rencontre des lupanars et des tunnels, de l’étalon-or et du corps désirant (tous deux présentés comme des abstractions). Il nous propose, de toute sa longueur monumentale et détendue, à la fois une intense débauche esthétique et une réflexion détaillée sur l’économie (la libidinale, avant tout). Portée par tous les acteurs fidèles de Serra, saturée d’homosexualité purement théorique et de conversations- fleuves, son intrigue de sitcom historique abat progressivement ses cartes jusqu’à se dissoudre sur le fond de l’avenir incertain de l’humanité. (L.C.)

  • Albert Serra en libertés

Fiche technique

Espagne / 2015 / 780’