• Albert Serra en libertés

ROI SOLEIL

Albert Serra

Albert Serra
Où l’on assiste, une nouvelle fois, après un chef-d’œuvre, La Mort de Louis XIV (2015), avec Jean-Pierre Léaud, à l’agonie du célèbre Roi, cette fois sous la forme déclarée d’un spectacle qui parle de lui- même : de l’art, de sa fin, de ses fins dernières. Film-performance, encore un peu plus littéralement que les autres films : puisqu’il filme l’agonie de Louis XIV (Lluís Serrat, son acteur-fétiche), en costume d’époque ou de scène, dans le white cube rouge sang d’une galerie d’art où pourrait à tout moment débarquer, en guise de cour, loin de Versailles, un public de visiteurs d’aujourd’hui. Toujours plus iconoclaste, mais toujours plus plasticien, Serra nous fait vivre l’épreuve, rend le coup de grâce sensible, physique – tout en ne parlant que d’image. Vider encore une fois la figure, pour ruiner le « figuratif », faire tenir tout un film en une simple formule, mais sans abandonner la forme, ni négliger la matière, en gardant toutes leurs séductions et leurs terreurs : c’est le cinéma post-conceptuel d’Albert Serra, dont Roi Soleil est le prototype en forme de monochrome. Une « pièce », comme on appelle ce que produisent les artistes, faite de quatre murs et d’un corps, au centre, qui joue à convoquer le pire, symboliquement, et à notre attention : le cinéma comme non-assistance à figure en danger. (L.C.)

  • Albert Serra en libertés

Fiche technique

Espagne, Portugal / 2018 / 61’