Le FIDMarseille et le festival Regards Satellites (29 janvier - 9 février) ont initié cette année une collaboration autour du cinéma d'Adirley Queiros et Joana Pimenta. Après la rétrospective qui leur a été consacrée lors de la dernière édition du FIDMarseille, ils reviennent en France, à Saint-Denis, pour une rétrospective dans le cadre de Regards Satellites.
Cette collaboration est complétée par une Carte blanche, qui consiste en deux premiers films présentés en première mondiale au FIDMarseille en juillet dernier.
BIENVENIDOS CONQUISTADORES INTERPLANETARIOS Y DEL ESPACIO SIDERAL
Andrés Jurado
Colombie, Portugal / 2024 / 95'
Compétition Premier Film FID 2024
Il est question d’un pays, la Colombie, tenu à l’arrière de l’histoire de la conquête spatiale. Un arrière littéral, puisque la NASA y a installé au début des années 60, dans la jungle à la frontière avec le Panama, la Tropic Survival School, un camp d’entraînement pour apprendre aux astronautes états-uniens à survivre en cas d’atterrissage forcé en milieu dit hostile. Un arrière, qu’Andrés Jurado, cinéaste de l’exhumation (voir El Renacer Del Carare, FID 2020), transforme ici en centre : celui d’une contre-histoire de cette conquête, écrite du point de vue colombien. Des images (mises en scène) de la rencontre entre des astronautes et un chaman Emberá dans la jungle, le réalisateur se sert comme tremplin pour lancer la matière de son film en orbite et nous propulser dans un espace anachronique et fantomatique. Une constellation d’images d’archives, de documents, et d’enregistrements sonores, témoignant de la fascination pour la course vers la Lune et de l’extractivisme impérialiste, compose ce voyage insolite et délirant, qui suit une double trajectoire. Orbitale, et mnémonique. L’agencement de ces fragments de réalité, sur lesquels le réalisateur intervient minutieusement – par recadrage, animation, reconstitution de voix synthétiques – suggère en effet la présence de spectres et les traces d’une mémoire inconsciente. Des survivances, que rappellent les échos palpitants des compositions électroacoustiques de Jacqueline Nova, et qui viennent faire effraction dans le présent des images. Leur mise en relation est un acte de révélation. Et ce voyage spectral, un puissant outil politique. Il révèle les fictions à l’oeuvre dans le récit officiel, et met en lumière un récit décentré, qu’Andrés Jurado nous offre à regarder dans toute sa complexité, à travers la longue vue du cinéma.
Louise Martin Papasian
Date : 30.01.2025 à 18h30
Lieu : Cinéma L'Écran, Saint-Denis
Carte blanche au FIDMarseille
Séance présentée par Louise Martin Papasian, membre du comité de sélection du FID
AMSEVRID
Tahar Kessi
Algérie, France, Qatar / 2024 / 118'
Prix Premier, FID 2024
« Il n’y a plus d’endroits où fuir : de tous côtés, le soir tombe ». Amsevrid s’ouvre sur un air de thriller crépusculaire et jazzy, entre les bruits parasites d’un message laissé comme on jette une bouteille à la mer et les crépitements d’un poste à souder dont les étincelles éclairent un à un des hommes renvoyés à l’anonymat d’un groupuscule. Qui est S.K ? Où va cette route ? Quel est ce personnage ? Très vite, on traque la fiction qui se désagrège comme l’on traque le réel à mesure que se succèdent archives télévisuelles et gros titres de journaux autour des révoltes, embrasements, trahisons et répressions. Ils scandent l’histoire de l’Algérie contemporaine depuis le fond de la décennie noire et du passé terroriste des années 90. Tahar Kessi ne cherche pas à expliquer ni à embrasser une vérité historique qui prendrait son parti. Hors de toute chronologie, nous cheminons, ramassant ci et là les éclats de beauté incandescente, plan par plan, assumant d’être désorientés dans le pli de ces images tremblées. Amsevrid met en lien des espaces, des temps, des hommes pris dans des jeux d’échos et de miroir, des formes, des sons, qui semblent affectés par les mêmes traumas. Les personnages semblent agir comme être agis dans le climat paranoïaque que distillent les résidus de la fiction. Amsevrid est tout aussi bien une traversée sombre et poétique qu’une cartographie mentale hantée. Le territoire que dessine Tahar Kessi est un continuum de corps levés, de moments de replis, de chants, de marches. Par deux reprises, des femmes, réunies autour d’un métier à tisser, rassemblent les fils un à un. Du film peut-être. Ou bien de l’Algérie qui voit inexorablement les hommes et les femmes se soulever, porté.es par l’idée que les révolutions tirent leur inspiration de l’avenir. Non du passé.
Claire Lasolle
Date : 30.01.2025 à 20h30
Lieu : Cinéma L'Écran, Saint-Denis
Carte blanche au FIDMarseille
Séance présentée par Louise Martin Papasian, membre du comité de sélection du FID
BRANCO SAI, PRETO FICA
Adirley Queirós
Brésil / 2014 / 93'
FID 2024
En présence de Adirley Queirós
Des coups de feu dans un bal de musique noire dans la banlieue de Brasilia blessent deux hommes. Un troisième vient du futur pour enquêter sur ce qui s’est passé et prouver que c’est la faute de la société répressive.
Date : 31.01.2025 à 20h30
Lieu : Cinéma L'Écran, Saint-Denis
Séance présentée par Louise Martin Papasian, membre du comité de sélection du FID