Longtemps Roger Corman a repoussé la mise en route de cette septième adaptation d’une nouvelle de Poe après La Chute de la Maison Usher, Le Corbeau… de crainte qu’on lui reproche de plagier le Septième Sceau. Si telle scène funèbre, la grande faucheuse hiératique et encapuchonnée peut faire songer à Bergman, ce n’est rapprochement qu’assez fortuit. Règne ici une luxuriance à l’opposé de l’austérité du maître suédois. The Masque Of The Red Death est le premier film que Roger Corman tourne en dehors des États-Unis, et c’est aussi une des rares fois où le budget comme le temps de tournage sont confortables. À l’image, Nicolas Roeg, qui s’est illustré ensuite avec David Lean et Truffaut, signe pour son premier long-métrage une photographie qui s’en donne à cœur joie. Car le rouge du titre est loin d’être la seule couleur à l’honneur : vert, pourpre, noir, blanc, jaune canari recouvrent en larges pans monochromes les murs des pièces du château, mais éclaboussent aussi tous les éléments du décor pour continuer à faire écho sur les tissus de chaque costume. Splendeur visuelle donc, d’autant plus frappante que le récit, à jouer très librement avec deux nouvelles empruntées à Poe, est sombre, voire terrifiant. C’est une fable sur l’exercice du pouvoir que livre en réalité The Masque Of The Red Death avec un Vincent Price à son meilleur en seigneur cruel, cynique et adepte de Satan. Voilà sans doute une des meilleures introductions à l’oeuvre de ce maître qu’est Corman que nous nous réjouissons d’accueillir et d’honorer cette année au FI D. (JPR)
Fiche technique
Film d’ouverture
États-Unis, Royaume-Uni / 1964 / Couleur / 90’
Version originale : anglais
Scénario : Charles Beaumont, R. Wright Campbell
Image : Nicolas Roeg
Montage : Ann Chegwidden
Son : Len Abbott, Richard Bird, Allan Morrison`
Avec : Vincent Price, Hazel Court, Jane Asher, David Weston, Patrick Magee, Nigel Green, Skip Martin, John Westbrook, Gaye Brown.
Production : Roger Corman (Alta Vista Productions).
Distribution : American International Pictures.