Mère d’une petite fille atteinte d’autisme, Claire Doyon, la réalisatrice, décide de tenter de soulager son enfant en se risquant à un lointain périple. Toutes deux vont se retrouver aux confins de la Sibérie mongole, en quête d’un chamane et de ses talents de guérisseur. De Paris aux steppes, le décor, on s’en doute, change. Ce qui soulignait le sentiment d’étouffement auquel l’enfant est soumise dans la capitale devient, dans un cadre de western épique, l’espace immense où ses gestes, certes toujours signaux de douleur, d’apnée, prennent soudain une autre dimension. Bras et tête levés au ciel, sa silhouette fragile semble peu à peu se fondre dans la vastitude de ce paysage si dégagé.
De ces rites archaïques auxquels, impressionnée, Pénélope est livrée, aucune garantie d’efficacité ne saurait être donnée bien sûr, et les parents en sont conscients. Mais ce voyage est entrepris surtout pour tâcher de déplacer la souffrance, physiquement, géographiquement, de la devancer ou de la noyer au milieu d’une culture inconnue. Du coup, les images tournées par Claire Doyon dans ce portrait de sa fille ne s’installent nulle part, jamais elles ne se contentent d’observer ; elles se révèlent plutôt, entières, faites d’amour, d’abandon, habitées de ce léger déséquilibre qui laisse y souffler par bourrasques le vent de la foi.
Jean-Pierre Rehm
Entretien avec Claire Doyon au sujet de PÉNÉLOPE paru dans le quotidien du FIDMarseille du 7 juillet 2012