LE CARROSSE D’OR
Jean Renoir
France, Italie / 1952 / Couleur / 102'
(Carte Blanche à Radu Jude)
En présence de Radu Jude.
Au XVIIIe siècle, une petite troupe de théâtre italienne débarque dans une colonie espagnole d'Amérique latine. Par le même bateau, arrive un carrosse d'apparat recouvert d'or, destiné au vice-roi. Camilla, qui joue Colombine, a cédé aux avances de Felipe, qui a voyagé avec elle. Les représentations commencées, elle ne tarde pas à être courtisée par Ramon, un torero célèbre dans toute la colonie, puis par le vice-roi, Ferdinand, qui invite la troupe à donner une représentation à la cour. Éperdu d'amour, ce dernier offre le carrosse d'or à Camilla, déclenchant la jalousie des autres prétendants, et une crise avec la noblesse...
Date : 21.01.2025 à 19h30
Lieu : Cinéma Elvire Popesco, Bucarest
En présence de Radu Jude.
VOYAGE AU BORD DE LA GUERRE
Antonin Peretjatko
France / 2024 / Couleur / 62 min
Compétition Française 2024
(Carte Blanche au FIDMarseille)
En présence d'Antonin Peretjatko.
Le 15 mai 2022 au matin, Antonin Peretjatko, son preneur de son et AndreÏ, réfugié ukrainien, quittent en voiture la banlieue parisienne. Destination Lviv – soit le bord de la guerre, pas son cœur. C’est sur ce bord qu’ils s’installent pour y rencontrer ceux qui, fuyant les destructions et la mort, y ont trouvé refuge. Pas de longues conversations : de brèves rencontres au cours desquelles les bribes d’expérience partagées suffisent à dire l’effroi de vies changées, traumatisées par l’agression russe. « Je prends une caméra 16mm : j’espère ainsi déjouer le formalisme et la façon de penser que nous impose le numérique ». Avant le départ, le cinéaste avait formulé cette profession de foi matérialiste : la pensée et la forme sont liées à l’outil, aux conditions matérielles de réalisation du film. Là sont la nécessité et la beauté du Voyage : fabriquer une autre approche, un autre récit, depuis un autre point de vue sur cette guerre – sur la guerre. Non pas contre ou à rebours des formes et discours médiatiques ou documentaires dominants : dans un complet dédain, une souveraine ignorance de ceux-ci. Souveraineté et innocence : on peut faire aujourd’hui son journal de voyage dans l’Ukraine en guerre dans les formes du cinéma d’hier – les années 60-70, pour aller vite. On peut même faire de cette urgence contemporaine l’occasion d’une résurrection de ces formes passées. Les travellings latéraux et avant fixent sur la pellicule, depuis la voiture, les traces de la guerre : immeubles éventrés, barrages routiers, etc. La voix off à la première personne, après l’arrivée à Lviv, prend les commandes du récit pour compliquer la simple chronique du voyage par un cheminement intime de la pensée. Un second voyage, en hiver, s’enfonce vers Kiyv. Cette fois on y est, là où ça a eu lieu : Boutcha, Irpin, villes martyres, presque fantômes. Quand le film s’achève, on réalise que depuis le bord, le voyage a atteint le cœur.
Cyril Neyrat
Date : 22.01.2025 à 18h30
Lieu : Cinéma Elvire Popesco, Bucarest
En présence d'Antonin Peretjatko.
DIE ÄNGSTLICHE VERKEHRSTEILNEHMERIN / LOSING FAITH
Martha Mechow
Autriche, Allemagne / 2023 / 100 min
Compétition Internationale, Compétition Premier Film 2024
(Carte Blanche au FIDMarseille)
En présence de Martha Mechow
Un intérieur ordinaire, une enfant de quelques années et un bébé. Une mère profite de quelques instants de répit quand sa fille l’appelle soudain avec insistance. La voilà qui se volatilise, littéralement engloutie par le canapé sur lequel elle est allongée. La scène inaugurale donne le ton, avec l’humour irrévérencieux que secrète la mise en scène électrique de Martha Mechow. La maternité est-elle une punition ? La servitude à laquelle se soumettent les femmes et le cœur du sempiternel « nœud hétérosexuel », ainsi nommé dans ce film joueur et frondeur ? Losing Faith se déplie comme un bildungsroman animé de la fantaisie du conte. Flippa en est le personnage principal. Sa mère a disparu. La voilà sur les routes qui la mènent jusqu’à sa sœur, Furia, et les sorcières-mères de Barranconi en Sardaigne. « Crois tu que c’est pour cette raison que maman est partie ? Car elle ne voulait en aucun cas nous transmettre les règles d’un monde qui nous vole notre liberté ? » Entre l’analyse acérée de Persuasion de Jane Austen, les coups de tronçonneuse dans les symboles de la chrétienté, les vues matérialistes quant à l’exploitation des femmes, Losing Faith est une bouffée d’air et ne craint ni le débordement ni la vitalité insolente de ses actrices. Mu par un esprit de communauté, ses embardées performatives et théâtrales libèrent le récit de toute rigidité théorique et narrative et brouillent les contours de la fiction. « Il n’y a aucun plan ; que des possibilités qu’il faut tester. C’est en les éliminant que s’écrit l’histoire. » rappelle une des sorcières. Tel va le film, sans filet, aventurier, profondément libre.
Claire Lasolle
Date : 22.01.2025 à 20h30
Lieu : Cinéma Elvire Popesco, Bucarest